Déjà fragilisé par des évolutions structurelles depuis plusieurs années, le monde associatif subit de plein fouet le contexte économique et politique actuel. Les conséquences sont lourdes pour les associations, et affectent la société en général. Il y a donc urgence à réagir, comme le détaille Claire Thoury, la présidente du Mouvement associatif, membre du Pacte du pouvoir de vivre.
Quelle est la situation financière actuelle des associations ?
Elle est inquiétante puisque les budgets des associations sont très dégradés. Dans la conjoncture économique que nous connaissons, de nombreuses collectivités considèrent les financements associatifs comme des variables d’ajustement. Les exemples sont malheureusement nombreux à l’instar de la Région Pays de la Loire qui a réduit de 10 millions d’euros ses financements pour le sport, la culture, la vie associative et l’égalité femmes-hommes.
Or le modèle associatif est par nature non lucratif donc il n’est pas question pour les associations de faire répercuter leurs problématiques financières sur leurs bénéficiaires, sur les personnes qui ont besoin d’elles. Cela irait à l’encontre de notre raison d’être, qui plus est dans un contexte où les besoins sont grandissants. Mais il va falloir trouver des solutions car ces difficultés, déjà importantes en 2024, ne cessent de s’amplifier. Ainsi, en 2024, 489 associations ont fait l’objet de liquidations, ce qui représentait déjà une hausse de 50% en deux ans. Et depuis le 1er janvier 2025, on déplore déjà 93 liquidations d’association.
Cette dégradation s’explique-t-elle aussi par d’autres facteurs ?
Oui elle est multifactorielle. Il y a une évolution structurelle depuis 20 ans avec un remplacement massif des subventions publiques par de la commande publique via des appels à projets. Cela change la nature du financement, restreint les marges de manœuvre des associations et crée une mise en concurrence dommageable entre les structures.
On assiste également à une fragilisation des libertés associatives depuis la mise en place du contrat républicain qui conditionne le financement public des associations et qui crée un climat de suspicion et un risque d'arbitraire. Mais les associations ne sont pas là pour plaire aux pouvoirs publics. Le rôle de certaines associations est justement de challenger l’action publique pour faire bouger les codes et les normes. Cela a par exemple été le cas pour faire évoluer le regard et les politiques publiques sur le sida. 40 ans plus tard, on les en remercie. Il faut donc absolument éviter d’avoir une vision court-termiste et se rappeler que s’en prendre aux associations, c’est s’en prendre à la société tout entière.
Comment réagir et faire évoluer cette situation ?
Pour les défendre au mieux, il convient de qualifier le plus finement possible la santé financière des associations. C’est pour cette raison que le Mouvement associatif a lancé une enquête flash, jusqu’au 12 mars avec Hexopée RNMA et l’Observatoire régional de la Vie Associative Hauts-de-France. Toutes les associations sont invitées à y participer.
Parallèlement, le Mouvement associatif travaille sur la sécurisation de la subvention publique et sur la garantie de financement socle pour le monde associatif. Il y a urgence à repenser ces modèles. Certes les associations se débrouillent toujours mais on ne peut pas se satisfaire de cette situation. La façon dont on traite le tissu associatif en dit long sur la santé de notre société : quand on traite aussi mal des gens qui se mobilisent pour faire du bien, ça ne va pas. Il faut qu’il y ait un sursaut, que l’on se mobilise collectivement.