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Marie-Aleth Grard : “il n’est humainement pas imaginable de laisser des dizaines de millions de personnes en Europe vivre la grande précarité au quotidien”

Le sondage IPSOS-PPV, réalisé dans le cadre des élections européenne, montre que les Français.es se projettent dans le projet de société du Pacte du pouvoir de vivre, et considère le sujet de la lutte contre la pauvreté comme sujet majeur pour les prochaines années.

Le Pacte du pouvoir de vivre propose l’adoption d’une législation contraignante pour l’instauration d’un revenu minimum garanti européen, accessible dès la majorité et dont le montant permette aux millions de personnes concernées de subvenir à leurs besoins premiers (logement, alimentation, soins notamment)

82% des Français.es le souhaitent également.

Nous avons demandé à Marie-Aleth Grard, Présidente d’ATD Quart-Monde (membre fondateur du Pacte du pouvoir de vivre en 2019), de réagir à ce chiffre.

82% des Français jugent souhaitable de mettre en place un plancher de ressources, c’est-à-dire un revenu minimum garanti pour tous les citoyens européens. Que t’inspire ce chiffre ?

Ce chiffre est vraiment encourageant : il montre que cela veut dire qu’ils sont bien nombreux les Français à se préoccuper de tous les citoyens et sont sensibles à ce que vivent au quotidien les adultes, jeunes et enfants qui vivent la grande précarité, l’impact de ces situations sur l’avenir des enfants et des jeunes. C’est un signe de solidarité important pour nous de voir combien les Français veulent que chacun puisse vivre correctement via un revenu minimum, et cela dans toute l’Europe. Pour moi ce chiffre est vraiment encourageant.

L’enquête montre aussi que 61% d’entre eux ne considèrent pas cette mesure réaliste…

C’est le fruit d’un discours porté par des responsables politiques qui nous expliquent sans cesse que cela couterait trop cher, ou qu’il s’agirait d’assistanat qui encouragerait les personnes à se contenter de ce revenu minimum. Il faut se connaitre pour se reconnaitre. J’ai la conviction que si les personnes prennent le temps de se connaitre, alors ils comprendront les questions légitimes de ceux qui vivent la grande précarité.

Quel niveau minimum de revenu doit-on avoir en France pour pouvoir vivre dignement ?

Au regard de la grande précarité que vivent les plus défavorisés dans notre pays avec le RSA (allocation différentielle revue tous les trois mois) qui a décroché des 50% du SMIC depuis longtemps (36% aujourd'hui), il faut trouver un montant viable pour les personnes. Le RSA, c’est la survie au quotidien. Nous proposons un revenu minimum à 60% du revenu médian de chaque pays européen.

Pourquoi cette proposition portée par le Pacte du pouvoir de vivre est-elle réaliste ?

D’une part, il n’est humainement pas imaginable de laisser des millions de personnes en France et des dizaines de millions en Europe vivre la grande précarité au quotidien sans aucun soutien des pays (en France 9,5 millions de personnes, 13 ans d’espérance de vie en moins) ; d’autre part si on réfléchit ces mesures à plus long terme, on voit bien que le coût de l’inaction est bien plus lourd que celui d’un revenu minimum garanti.

La grande pauvreté à un coût humain très lourd et un coût financier pour notre société non négligeable (problèmes de santé, enfants placés, allocations diverses, éducation … ). Or, ce que les études montrent, c’est que si les personnes sont mieux soutenues au quotidien, les coûts pour la société baissent et la société vit davantage en paix. Les liens entre les citoyens sont renforcés et meilleurs, les jeunes peuvent envisager leur avenir et les enfants osent rentrer dans les apprentissages à l’école.

“Avec le Pacte du Pouvoir de Vivre nous voulons une société qui ne laisse personne de côté, une société qui permette à chacune et chacun de vivre à égale dignité dans la paix, et ce revenu minimum y participe.”

— Marie-Aleth Grard, Présidente d'ATD Quart-Monde 

  • Marie-Aleth GRARD

Alliée du Mouvement ATD Quart-Monde depuis 40 ans, Marie-Aleth Grard a notamment été déléguée locale de l’association dans l’Essonne, responsable nationale de la branche enfance d’ATD Quart Monde et a travaillé sur les questions d’éducation au sein du département école. Avant d’être élue présidente, elle a été membre de la Délégation nationale de 2014 à 2018 et vice-présidente de 2008 à 2020. Elle a également été membre du CESE durant 13 ans au nom d’ATD Quart Monde, où elle a porté l’avis “Une école de la réussite pour tous“.