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Pascal Brice : " Nous demandons au Premier ministre de retirer la circulaire Retailleau"

Dans une circulaire en date du 23 janvier 2025, le ministre de l’Intérieur impose aux préfets des restrictions drastiques à la régularisation des étrangers sans titre de séjour. Cette nouvelle circulaire suscite une vive opposition du Pacte du pouvoir de vivre, qui dénonce une remise en cause des valeurs fondamentales de la République et appelle le Premier ministre à la retirer sans délai.

Pascal Brice, président de la Fédération des Acteurs de la Solidarité (FAS) membre du Pacte du pouvoir de vivre, nous éclaire sur les raisons de cette opposition.

Pourquoi le Pacte estime t-il que la circulaire est un recul pour le droit des étrangers ?

C’est un recul dans l’accès aux titres de séjour qui s’ajoutent à beaucoup d’autres depuis plusieurs mois et notamment depuis la dernière loi immigration. D’abord par les dispositions qu’elle énonce et notamment la forte incitation à limiter les régularisations par le travail aux seuls secteurs en tension, l’extension à 7 ans de la période de résidence pour le critère d’intégration et l’édiction automatique d’un ordre d’expulsion (OQTF) en cas de rejet d’une demande de régularisation.

Ensuite par le climat qu’elle installe. Dans les préfectures, déjà très surveillées et de moins en moins enclines à user de leurs possibilités de régularisation, la pression s’accentue sous couvert de cette circulaire. Or ce sont les préfectures que les personnes concernées, les associations et les entreprises ont comme interlocutrices. Il nous faut compter sur leur lucidité. Et puis il y a les discours du ministre de l’Intérieur qui continuent à essentialiser les étrangers, à les livrer en pâture comme un problème en soi. C’est inacceptable au regard de la tradition républicaine de fraternité. Tout cela est un recul pas seulement pour le droit des étrangers mais pour la société, ses valeurs, la tranquillité publique et l’économie

Quelles conséquences concrètes pour les personnes concernées et pour les organisations qui les accompagnent ?

Il y a déjà à l’œuvre nombre d’impasses qui pèsent lourd sur les vies et les engagements. Les régularisations visées ne concernaient qu’à peine plus de 30 000 personnes par an. Mais cette circulaire ajoute une pierre supplémentaire à un mur contre lequel tant de personnes étrangères, leurs familles, les bénévoles et les professionnelles des associations, mais aussi les agents du service public des étrangers, se cognent la tête. Ce type de dispositions poussent les personnes vers la précarité morale et matérielle. Elles alimentent le découragement – ou la colère – des bénévoles. Elles attisent la perte d’attractivité du travail social. Elles livrent des personnes à la rue. Elles empêchent les entreprises de fonctionner normalement. Pour toutes ces raisons, nous demandons au Premier ministre de retirer la circulaire Retailleau. 

Que propose le Pacte concernant la régularisation des personnes présentes en France sans titre ni séjour ?

Tout devrait conduire - la dignité des personnes, le respect des engagements professionnels et bénévoles, l’ordre public, le dynamisme des entreprises - à un accès simplifié au séjour dans le cadre du droit. Les régularisations sont la marque des dysfonctionnements, de la fermeture de l’accès légal au séjour. Nous demandons au gouvernement et au Parlement de reprendre et d’enrichir les dispositions un temps discutées à l’automne 2023 pour un droit à la régularisation opposable sans l’accord de l’employeur. Concernant l’application de la loi actuelle, nous continuons à peser pour que les listes des métiers en tension par région, et donc l’accès au travail, soit réellement adaptée aux besoins des bassins d’emploi. Et les organisations membres du Pacte – syndicats, associations, fondations, mutuelles - agiront pour faire vivre des dispositifs adaptés sur les territoires.