« La concorde ne se décrète pas, elle se construit » 

Le 2 mai, les organisations du Pacte du pouvoir de vivre ont adressé au Premier ministre 15 mesures d’urgence à mettre en œuvre prioritairement en cette période de fin de confinement. Ces propositions visent à apporter des réponses immédiates aux millions de personnes durement touchées par la crise : demandeurs d’emploi, sans-abris, ménages et jeunes précaires en difficulté pour payer leur loyer et leurs charges, pour se soigner, se nourrir convenablement, personnes handicapées ou âgées, migrants et réfugiés, décrocheurs scolaires…

Notre démocratie n’a en effet jamais eu autant besoin de se reposer sur l’expertise collective et l’engagement de l’ensemble des composantes de la société qui la font vivre au quotidien.

Elles visent aussi à remettre, sans attendre, les enjeux essentiels sur le haut de la pile : l’accès aux soins, le développement des modes de transport vertueux, les conditionnalités écologique et sociale des aides aux grandes entreprises, le soutien et la valorisation des métiers du soin et de l’accompagnement…

Le Pacte fera tout son possible pour que ces propositions justes et indispensables soient effectivement mises en œuvre. Mais parallèlement, il nous faut sans attendre initier un véritable changement de mode de gouvernance. C’est l’objet de notre 15e proposition qui appelle à la tenue d’une « conférence de la transformation écologique et sociale ».

Depuis le début de la crise sanitaire, les 58 organisations du Pacte du pouvoir de vivre – associations, syndicats, fondations, mutuelles – se sont fortement mobilisées pour apporter un maximum de réponses concrètes aux difficultés rencontrées par nos concitoyens. A cette occasion, elles ont été les témoins, souvent en première ligne, de ce que nous savions déjà depuis fort longtemps : le creusement des inégalités – à l’intérieur de nos pays « riches » mais aussi à l’échelle de la planète –, les situations d’exclusion insupportables, ou encore un modèle de développement devenu un non-sens pour notre société.
Mais cette crise a également mis en évidence les profondes et inquiétantes défaillances de la communauté nationale et de la puissance publique à écouter, prendre en compte, anticiper les souffrances sociales comme les désastres écologiques qui nous menacent. Cette réalité décuple notre inquiétude face à des décisions qui ne prendraient pas en compte simultanément les urgences sociale, climatique et démocratique.

Le temps est donc venu de poser la première pierre d’une nouvelle approche des politiques publiques et d’une nouvelle gouvernance. Notre démocratie n’a en effet jamais eu autant besoin de se reposer sur l’expertise collective et l’engagement de l’ensemble des composantes de la société qui la font vivre au quotidien.

La Conférence que nous appelons de nos vœux doit être la première illustration concrète d’un changement de méthode permettant de reconstruire notre société sur des bases écologiquement résilientes et socialement justes. Elle devra ainsi rassembler la société civile organisée, c’est-à-dire les associations, syndicats, mutuelles qui composent le Pacte du pouvoir de vivre et au-delà, mais aussi les organisations patronales, les élus locaux, les parlementaires…

Les règles du jeu devront être claires et énoncées à l’avance, car la concorde ne se décrète pas, elle se construit.
Elle devra se dérouler dans un format court avec des objectifs circonscrits et notamment celui d’aboutir à une loi de transformation écologique et de justice sociale qui impulserait le véritable changement structurel qui s’impose sur le plan de la justice sociale comme de nos responsabilités écologiques.

Les propositions qui sortiront devront ainsi permettre de réduire nos émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55% en 2030 par rapport à 1990. La conférence devra également prendre appui sur les résultats et premières propositions issus du travail approfondi mené par la Convention Citoyenne sur le Climat, et sur l’expertise du haut conseil pour le climat afin de s’assurer que les décisions prises soient compatibles avec nos engagements climatiques. Elles devront s’incarner dans des arbitrages budgétaires et fiscaux qui seront opérés dans les semaines et mois à venir : Plan de relance et notamment déclinaison des 39 milliards d’euros issus du Fonds de relance européen, projets de loi de finances…Enfin, elles devront faire l’objet de traductions budgétaires concrètes pour répondre simultanément et avec ambition aux urgences sanitaires et sociales ainsi qu’aux enjeux écologiques à moyen et long termes.

Les compromis, permettant de construire collectivement les politiques publiques de demain, devront conduire à la mise en place de dispositifs publics qui tiennent compte de la diversité des territoires et des responsabilités des parties prenantes publiques ou privées de la conférence. Celle-ci devra autant que nécessaire conduire à une évolution des normes, pour permettre à notre pays de changer d’échelle sur les questions environnementales et respecter nos objectifs nationaux et internationaux.
Cette proposition qui a suscité l’intérêt de députés issus de diverses sensibilités politiques n’a fait l’objet que d’une réponse polie de la part du Premier ministre. Nous regrettons vivement et ne comprenons pas cette posture. Nous pensons que ce serait une erreur majeure de ne pas s’engager rapidement dans une telle initiative.

Nous pensons qu’il est grand temps de changer de regard, de repenser la place des acteurs sociaux et intermédiaires dans la définition des politiques publiques afin de garantir leur justesse et la vivacité de notre démocratie. Les organisations du Pacte du pouvoir de vivre représentent des millions de militants, bénévoles, salariés et citoyens qui sont prêts – à condition que les prérequis soient réunis – à s’engager activement dans une telle démarche.
A ce jour, aucune réponse n’a été apportée pour relever ce défi démocratique qui représenterait un véritable progrès politique. C’est pourquoi nous réitérons aujourd’hui notre proposition de mise en place rapide d’une « conférence de la transformation écologique et sociale ».

C’est une nécessité absolue si nous voulons pouvoir collectivement décider de notre avenir et nous donner un nouvel horizon commun après la crise.

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